lundi 22 août 2011

L’ocytocine en bolus au cours des césariennes, avec ou sans perfusion ?


Actuellement dans les pays développés, le taux de césariennes oscille entre 20 et 30 % alors qu’il avoisine les 70 % dans certains pays d’Amérique latine. Le risque hémorragique s’élève lui aussi en conséquence.

Pour prévenir ce risque, certaines recommandations préconisent en routine l’administration d’un bolus de 5UI d’ocytocine après la sortie de l’enfant. Des enquêtes réalisées dans des services d’obstétrique révèlent qu’une perfusion supplémentaire d’ocytocine est parfois nécessaire, certains y recourant systématiquement chez les patientes à haut risque hémorragique. Ceci se justifie par le fait que l’ocytocine administrée par voie intra-veineuse a une demi-vie courte, de 4 à 10 minutes. La perfusion permet de maintenir la contractilité utérine plus longtemps dans le post-partum immédiat.

Les deux approches ont été comparées dans une étude contre placebo réalisée dans 5 maternités de la République d’Irlande, incluant 2 068 femmes ayant bénéficié d’une césarienne en dehors de tout contexte d’urgence. Les patientes recevaient soit un bolus de 5UI d’ocytocine suivi d’une perfusion de 40 UI d’ocytocine dilué dans 500 ml de sérum salé à 0,9 % pendant 4 heures (n = 1 033), soit le bolus suivi d’une perfusion sans ocytocine (n = 1 025).

Environ 1 femme sur 6 a présenté une hémorragie importante, évaluée à plus  de 1 000 ml, mais cette proportion est la même dans les deux groupes : 15,7 % dans le groupe bolus et perfusion d’ocytocine vs 16,0 % dans le groupe bolus (OR 0,98, IC 95 % : 0,77 à 1,25, p = 0,86). La nécessité d’administrer un autre produit utérotonique pour prévenir l’hémorragie se fait toutefois un peu moins sentir dans le groupe ayant reçu également l’ocytocine en perfusion (12,2 % vs 18,4 % ; 0,61, 0,48 à 0,78, P < 0,001).

Mais il y a un élément qui paraît influencer le risque hémorragique, il s’agit de l’expérience de l’obstétricien. Le risque d’hémorragie semble en effet différent selon que l’obstétricien est expérimenté ou débutant (13,1 % vs 19,6 %). L’analyse en sous-groupes en fonction de l’expérience du praticien, montre qu’il survient moins d’hémorragies graves dans le groupe bolus et perfusion que dans le groupe bolus seul quand le praticien est peu expérimenté (OR 0,57, IC 95 % : 0,35 à 0,92, P = 0,02).

Les auteurs remarquent au passage que les accidents hémorragiques sont particulièrement fréquents dans cette étude, et il leur apparaît dès lors difficile d’évaluer avec précision le risque hémorragique individuel de chaque patiente. Ils estiment de ce fait qu’il pourrait être justifié d’associer systématiquement une perfusion d’ocytocine au bolus initial, surtout quand l’obstétricien est peu expérimenté.

Sheehan S.S. et coll.:Oxytocin bolus versus oxytocin bolus and infusion for control of blood loss at elective caesarean section: double blind, placebo controlled, randomised trial
BMJ 2011; 343 : d4661 doi: 10.1136/bmj.d4661