Une étude récente et étonnante se demande si l’arrêt spontané du tabac ne serait pas le 1er signe d’un cancer du poumon.
Elle a été menée au sein d’un groupe de « vétérans », tous fumeurs, présentant soit un KBP (115 patients) soit un cancer de prostate -KP- (101) soit un infarctus du myocarde –IM- (99), ces deux derniers groupes servant de comparaison car considérés comme reflétant une population générale.
Dans les 3 groupes, les patients précisaient s’ils avaient eu des signes d’appel avant le diagnostic (type, date de début), s’ils étaient encore fumeurs au moment du diagnostic -fumeurs actifs- (début, quantité, habitudes..) ou s’ils avaient cessé de fumer –anciens fumeurs- (depuis quand, difficultés pour arrêter, prise de poids..).
Le degré d’addiction à la nicotine était testé spécifiquement (test de Fagerström) et un prélèvement de salive réalisé (dosage cotinine).
De cette étude quelque peu confuse on retiendra que :
• Dans les 3 groupes de patients (KBP, KP, IM), les anciens fumeurs étaient plus âgés que les fumeurs actifs. C’était surtout vrai pour les KBP avec une différence d’âge médiane de 10 ans.
• Pour les KBP, le délai entre l’arrêt du tabac et le diagnostic de cancer est beaucoup plus court (2,7 ans) que pour le KP (24,3 ans) ou l’IM (10 ans)
• Le temps d’exposition au tabac, le degré d’addiction et la difficulté à arrêter de fumer sont beaucoup plus marqués pour les anciens fumeurs avec un KBP que pour les autres groupes.
• Que des patients arrêtent souvent de fumer avant le diagnostic d’un KBP et que cet arrêt n’est souvent pas difficile. Ici tous les KBP avaient été fumeurs et près d’un sur 2 (48 %) ont cessé de fumer avant le diagnostic de leur cancer et seuls 11 % d’entre eux étaient symptomatiques à ce moment-là.
• De même, 38 % de fumeurs actifs avec un KBP ont réduit de plus de 50 % leur consommation de tabac dans l’année qui a précédé le diagnostic (ce qui n’est le cas que pour 17 % des KP et 4 % pour les IM).
Cette étude suggère une relation entre l’arrêt du tabac et l’existence d’un KBP, cet arrêt pouvant constituer un des premiers signes de KBP.
À l’inverse de ceux qui pensent que l’arrêt du tabac induit le KBP (la durée moyenne de 2,7 ans entre l’arrêt du tabac et le diagnostic de KBP est trop courte pour provoquer le développement d’un KBP), ils pensent que le KBP induit l’arrêt du tabac (certains KBP secrèteraient des médiateurs qui moduleraient les effets de la nicotine : histamine, neurokinines et autres tachykinines voire quelques opoïdes endogènes).
Les auteurs croient que les gros fumeurs de longue date qui s’arrêtent spontanément de fumer sans grosses difficultés ont de grandes chances d’avoir un cancer du poumon même s’il n’est pas encore diagnostiqué.
Mais ils précisent que cela ne doit pas être compris comme une incitation à ne pas s’arrêter de fumer !!!!
Dr Roland Charpentier
Campling BG et coll. : Spontaneous Smoking Cessation Before Lung Cancer Diagnosis
J Thorac Oncol. 2011;6: 517-524