dimanche 31 juillet 2011

Des protéines de lait et de soja pour limiter la pression artérielle ?

Nouvelle-Orléans, Etats-Unis - Selon des résultats publiés dans Circulation, il pourrait être avantageux de substituer une partie des glucides de l'alimentation par des protéines de lait ou de soja pour abaisser la pression artérielle (PA) systolique moyenne dans la population [1].

L'étude qui aboutit à cette conclusion a été menée chez 352 adultes au stade de la pré-HTA ou de l'HTA de stade 1. La proportion de patients hypertendus était de 18,5%, et la PA moyenne, de 126,7/82,4 mm Hg. Elle visait à comparer les effets tensionnels d'une supplémentation de 40 g/j en protéine de lait, en protéines de soja, ou en glucides complexes, prise durant huit semaines. On note que les participants avaient reçu des consignes pour réduire l'apport calorique de leur alimentation habituelle d'un montant équivalent à l'apport de la supplémentation. La supplémentation glucidique est par conséquent considérée comme ayant valeur de placebo par les auteurs.
Le protocole semble avoir été soigneusement conduit, en double aveugle, avec randomisation et cross-over. Chaque période de supplémentation était suivie d'un sevrage (wash-out) de trois semaines. Les différentes supplémentations étaient équilibrées entre elles pour leur contenu en sodium, potassium et calcium.
Par ailleurs, les évaluations des apports alimentaires effectués en cours d'étude ont bien montré une augmentation attendue de la fraction protéique lors des périodes de supplémentation en protéines de lait ou de soja, et une augmentation de la fraction glucidiques lors des supplémentations contrôle. Mais les apports caloriques totaux n'ont pas varié en fonction de la supplémentation. Enfin, la PA a été mesurée au cours de deux visites, et à trois reprises à chaque fois.

Réduction de la PA systolique

Premiers résultats : par rapport aux valeurs de base, la PAS était réduite de 1,5 mm Hg sous supplémentation en protéines de soja (p=0,002), et de 1,8 mm Hg sous supplémentation en protéines de lait (p<0,001). Sous supplémentation glucidique en revanche, la PAS ne varie pas par rapport à sa valeur initiale. La PAD, elle, reste constante dans toutes les configurations.
Seconds résultats : par rapport à la supplémentation glucidique de référence, la supplémentation en protéines de soja est associée à une diminution de 2 mm Hg de la PAS (p=0,002), et la supplémentation en protéines de lait, à une diminution de 2,3 mm Hg (p=0,0007).
Enfin, comme toujours quand il s'agit d'alimentation, les effets secondaires rapportés par les patients sont fréquents, avec des chiffres de l'ordre de 25% pour le changement d'appétit, ou de 15% pour la constipation. Mais aucun écart significatif n'a été observé en fonction du type de supplémentation.

Des mécanismes peu étudiés et mal compris

Les auteurs indiquent que l'effet favorable des protéines de soja sur la PA et sur les lipides avait déjà été signalé, ainsi que l'effet sur la PA d'une diète riche en produits laitiers allégés. Cet effet des produits laitiers avait notamment été retrouvé dans l'étude MONICA.
Ils ajoutent cependant que cet effet tensionnel du lait était attribué au calcium et au potassium, et que leur étude est « la première à documenter une baisse de PA associée aux protéines de lait dans la pré-HTA et l'HTA de stade 1. »
A titre d'explication, les auteurs, toujours, suggèrent que cet effet pourrait être lié à des peptides inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine, présents dans le lait, aux casokinines et autres lactokinines, dont l'effet tensionnel a été montré chez l'animal et chez l'homme, ainsi qu'à l'acide glutamique, dont l'effet tensionnel a été montré dans l'étude INTERMAP, et qui constitue à lui seul 19,5% des protéines de lait, et 21,5% des protéines de soja.
D'une manière générale cependant, les mécanismes des effets observés restent très hypothétiques, et les auteurs soulignent au passage « l'inconsistance » des résultats publiés jusqu'à présent sur la relation entre protéines alimentaires et PA.

Des effets non négligeables, mais à vérifier

En pratique, l'effet d'une réduction de 2 mm Hg de la PAS ne serait probablement pas négligeable à l'échelle d'une population. Selon le National High Blood Pressure Education Program américain, cette réduction se solderait par des diminutions de 6% la mortalité par AVC, de 4% de la mortalité coronarienne, et de 3% de la mortalité toutes causes confondues [2].
En pratique cependant, avant de recommander une augmentation de la fraction protéique dans l'alimentation, des essais plus importants doivent être menés, avec un suivi plus long et si possible, un test de la relation dose-effet entre apport protéique et PA, soulignent les auteurs.