dimanche 31 juillet 2011

96 % de contamination évitées avec un traitement précoce du VIH

Rome, Italie - « Traiter précocement les patients infectés par le VIH permet de réduire de 96 % le risque de transmission. dans les couples hétérosexuels » a annoncé le Pr Myron Cohen (Université de Caroline du Nord) lors de la présentation des résultats de l'essai HPTN 052 à la 6e conférence de l'IAS(International AIDS Society) à Rome. [12]

L'étude HPTN 052, dont les résultats sont également publiés dans le New England Journal of Medicine,a été arrêtée prématurément en mai 2011 par le comité indépendant d'analyse des données en raison de perte de chance pour les patients dans l'un des bras de l'étude.
Au total, 1763 couples vivant au Malawi, au Zimbabwe, au Botswana, en Afrique du sud, au Brésil, en Thaïlande aux Etats-Unis et en Inde ont été recrutés. N'ont été inclus dans l'étude que des couples hétérosexuel, sérodiscordants et dont l'un des deux partenaires présentait un taux de CD4 compris entre 350 et 500 cellules/mm3 et n'était donc pas, en suivant les recommandations habituelles, éligible pour un traitement anti VIH. A l'entrée dans l'étude, chaque couple a été tiré au sort soit pour recevoir un traitement immédiatement, soit pour faire partie du bras traitement selon les recommandations nationales (à partir d'un taux de CD4 compris entre 200 et 250 selon les pays). Globalement, l'étude comptait autant de femmes que d'hommes infectés même si la proportion de femmes était très légèrement supérieure en Afrique. 95 % des couples étaient mariés et 6 % d'entre eux déclaraient avoir eu des rapports sexuels non protégés avec leur conjoint dans le mois précédent l'inclusion.

Des protocoles thérapeutiques propres à chaque pays

Les traitements prescrits faisaient appel selon les pays à de la lamuvidine associée à de la zidovudine, de l'éfavirenz, de l'atazanavir, de la névirapine, du ténofovir, de la lamuvidine, de la zidovudine, de la didanosine, de la stavudine, du lopinavir associé à du ritonavir, du ritonavir ou une association emtricitabine et ténofovir.
« Lorsque le traitement a été mis en place précocement (taux de CD4 de 350 à 550), le risque de transmission du virus au partenaire était abaissé de 96 % en moyenne deux ans après le début de l'étude : 36 personnes ont été infectées dans le bras sans traitement contre 4 lorsque le partenaire bénéficiait d'un traitement », analyse le Pr Cohen.
Les investigateurs ont procédé à un génotypage des souches afin de préciser si l'infection pouvait être liée de façon certaine à celle du partenaire habituel. [3] Pour 11 cas d'infection, cette question n'a pu être tranchée positivement. Il reste donc de façon très probable, 28 cas d'infections dans les couples suivi, dont une chez un couple traité. 66 % des infections sont survenues dans des couples où la femme était infectée et 82 % des transmissions du virus ont eu lieu en Afrique. « La grande majorité des infections ont eu lieu chez des personnes dont le taux de CD4 était supérieur à 350, ce qui conforte encore l'idée d'une véritable prévention par le traitement », pour le Pr Cohen.
Le cas de transmission dans le bras traité a été particulièrement analysé : au moment de l'inclusion dans l'étude, le patient présentait une charge virale de 87 202 copies et un taux de CD4 de 400. Aucun facteur spécifique génétique viral n'a pu expliquer cette contamination.

Comment financer une telle stratégie ?

Si cette présentation a été accueillie avec enthousiasme par les participants de la conférence, elle soulève néanmoins des questions pratiques.
Le Dr Elly Katabira, président de l'IAS a rappelé combien l'équilibre des fonds alloués au SIDA était délicat encore actuellement et combien toute modification dans l'indication des traitements pourrait rendre délicat l'accès au traitement dans certaines régions du monde. Pour le Pr Jean-Paul Moatti, professeur en économie de la santé (Inserm, Université de la Méditerranée), " la prévention par le traitement aboutirait à une hausse des dépenses dans des proportions contrôlables" et, au bout d'une dizaine d'années, la communauté internationale dans son ensemble pourrait bénéficier de cette initiative puisque grâce à des programmes massifs de prévention "le pays paie moins pour la santé et perd moins de jours de production car la personne n'est pas malade".