samedi 12 novembre 2011

Nous ne somme pas tous égaux devant la grippe

Notre profil génétique nous rend plus ou moins vulnérables face au virus de la grippe, selon une étude franco-américaine.
«Nous ne sommes pas tous égaux face à la grippe, estime le Pr Bruno Lina, directeur du Centre national de référence de la grippe, à Lyon. Certains développent des formes gravissimes sans que l'on sache pourquoi alors que d'autres ne présentent jamais de symptômes importants». En fait, près de 30 à 50 % des cas de grippe saisonnière seraient même asymptomatiques. Cette inégalité flagrante pourrait être une affaire de gènes. C'est en tous cas ce que suggère une étude franco-américaine destinée à analyser le profil d'expression génique des personnes ayant la grippe (Plos Genetics).

Pour cela, les auteurs ont recruté 17 personnes non infectées et les ont contaminées par voie nasale avec la souche H3N2, fréquemment rencontrée lors des épidémies hivernales. Ils ont ensuite prélevé des échantillons sanguins à 16 reprises au cours des six jours qui ont suivi l'infection afin d'observer les niveaux d'expression des gènes au cours du temps dans les cellules circulant dans le sang (globules bancs, plaquettes, etc). L'équipe a développé pour cela un vaste programme mathématique et informatique qui a permis l'analyse de plus de 22.000 séquences de gènes.

Parmi les dix-sept participants, neuf sont tombés malades et les autres ont été infectés mais sans conséquence pour leur santé. Les auteurs ont constaté que le virus avait déclenché l'expression de 5000 gènes chez toutes ces personnes mais avec des différences significatives entre ces deux groupes. «Il existe un profil génétique corrélé à l'apparition des symptômes», résume Nicolas Dobigeon, Institut National Polytechnique de Toulouse et co-auteur de l'étude. En effet, certains gènes déclenchent les symptômes et d'autres les inhibent.
Les auteurs ont ainsi pu dresser deux profils génétiques: l'un induit rapidement une réaction inflammatoire et déclenche les premiers symptômes environ 36 heures après l'infection alors que le second privilégie la production de protéines à fonction antioxydante qui protègent la cellule de l'infection et régulent la réponse immunitaire sans déclencher de symptôme.

L'origine de ces différents profils d'expression reste pour l'instant méconnue. Ils pourraient être liés à l'environnement ou tout simplement au patrimoine génétique de chacun. «Quoi qu'il en soit ce travail est fondamental. C'est le point de départ pour identifier des patients qui peuvent poser problème face au virus, selon Bruno Lina. Il est désormais envisageable d'obtenir des marqueurs biologiques grâce auxquels on pourra évaluer la sévérité potentielle de la maladie chez certaines personnes vulnérables. En outre, le fait de décrire les mécanismes innés de défense immunitaire ouvre la voie au développement de nouveaux médicaments».