Dans quelques années, peut-être, des technologies ou des médicaments antivieillissement qui nous semblent impossibles ou futuristes aujourd'hui, comme l'étaient la greffe d'organes et la fécondation in vitro au début du siècle dernier, seront monnaie courante. En début de semaine, des chercheurs français ont réussi à rajeunir jusqu'au stade embryonnaire des cellules de centenaires .
Jeudi, des scientifiques américains de la clinique Mayo (Minnesota, États-Unis), dirigés par Jan van Deursen, révèlent qu'ils ont réussi à débarrasser l'organisme de souris de vieilles cellules qui s'accumulent avec l'âge. Ils estiment que cela permet de retarder ou de prévenir l'arrivée de maux liés au vieillissement et de prolonger les années de vie en bonne santé. «Ces travaux sont très intéressants, affirme Hugo Aguilaniu, un des meilleurs chercheurs français en biologie sur la problématique du vieillissement (École normale supérieure de Lyon/CRNS). Ils ouvrent vraiment des nouvelles perspectives, à long terme, bien sûr.»
Leurs travaux, publiés dans la revue britannique scientifique Nature, portent sur un modèle de souris modifiée génétiquement. Ils démontrent pour la première fois que si l'on parvient à éliminer les cellules sénescentes de l'organisme, celui-ci reste en bien meilleur état général. Comme si les cellules vieillissantes venaient contaminer les autres, contribuant à les vieillir à leur tour. Les cellules ayant atteint l'état de sénescence cessent de se diviser en nouvelles cellules, mais produisent en effet des substances qui détériorent les cellules voisines et provoquent une inflammation des tissus. Les cellules sénescentes représentent au plus 10 à 15 % de l'ensemble des cellules des sujets très âgés. Le système immunitaire élimine régulièrement ces cellules mais se trouve débordé au fil du temps. Du coup, elles ne cessent de s'accumuler.
Les chercheurs ont créé des souris transgéniques (modifiées génétiquement, dites INK-Attac), dont les cellules sénescentes contiennent une enzyme, la caspase 8, activée uniquement en présence d'un médicament et sans effet sur les cellules normales. Une fois les souris exposées au médicament, l'enzyme induit spécifiquement la mort des cellules sénescentes. Les chercheurs ont pu observer que l'élimination des seules cellules sénescentes durant la vie des rongeurs retardait des troubles liés à l'âge, comme la cataracte, la fonte musculaire ou l'amincissement de la peau, des phénomènes caractéristiques du vieillissement normal. Ils ont également pu voir que la destruction de ces cellules y compris plus tardivement dans la vie pouvait aussi ralentir la progression de désordres déjà présents. «En attaquant ces cellules et leurs produits, nous pourrons peut-être un jour briser le lien entre les processus du vieillissement et la prédisposition à des maladies, comme les maladies cardiaques, les attaques cérébrales, les cancers ou les démences », prophétise James Kirkland, coauteur de l'étude.
Cette semaine également, des scientifiques suédois, cette fois, de l'université de Göteborg, qui travaillent sur le fait que la restriction calorique prolonge la durée de vie dans de nombreuses espèces, ont réussi à démontrer, chez la levure, que l'effet de cette restriction agissait par le biais d'une enzyme, la peroxiredoxine 1 (Prx1). Et que l'on pouvait allonger la durée de vie sans restriction calorique avec de la Prx1 chez la levure, ou la réduire, en retirant cette fameuse enzyme.