mardi 28 février 2012

Un nouvel anti-grippal de large spectre à l’essai

L’essai clinique FluMeD vient de démarrer pour évaluer sur 161 patients l’efficacité anti-grippale du midodrine, une molécule déjà sur le marché pour son action anti-hypotensive. Son activité antivirale s’est montrée prometteuse in vitro contre l’ensemble des virus influenza, y compris le virus pandémique de type A(H15N1) ayant circulé en 2009.


L’étude FluMeD testera sur deux saisons d’épidémie grippale 2011-2012 et 2012-2013, le chlorhydrate de midodrine, un médicament déjà disponible pour traiter l’hypotension. L’objectif est de confirmer son action anti-grippale observée in vitro et d’élargir ainsi l’indication thérapeutique de cette molécule.

De nouveaux anti-grippaux à l’étude

Le laboratoire VirPath dirigé par le Pr. Bruno Lina à Lyon, en partenariat avec l’Inserm, travaille depuis 2008 à l’identification de nouvelles molécules anti-grippales au mode d’action original. Actuellement, les antiviraux disponibles bloquent spécifiquement des protéines virales afin de limiter la réplication et la dissémination du virus dans l’organisme. Mais cette stratégie se heurte au problème de la grande variabilité des virus. "Un traitement exerce une pression de sélection sur le virus qui mute rapidement et devient ainsi résistant", insiste le Dr. Manuel Rosa-Calatrava (Inserm), coauteur des travaux. A ce titre, son équipe (VirCell) a travaillé sur une nouvelle approche : cibler les voies de signalisation cellulaires détournées par les virus de la grippe et qui rendent les cellules de l’hôte favorables à l’infection, puis identifier des molécules déjà existantes qui bloqueraient les voies de signalisation en question.

Rendre les cellules de l’hôte hostiles à l’infection

Dans un premier temps, l’équipe du Dr. Manuel Rosa-Calatrava en collaboration avec la plateforme TAGC (Inserm U928, Marseille) et l’équipe du Dr. Jean-Jacques Diaz (CRCL, Lyon), ont travaillé sur des cultures de cellules épithéliales pulmonaires humaines infectées par différents virus de la grippe de type A humains (H1N1 et H3N2) et aviaires (H5N1, H5N2 et H7N7). Les chercheurs ont constaté que l’infection par ces virus modifie systématiquement l’expression d’environ 300 gènes qui induit un état cellulaire propice à l’infection. "Une signature cellulaire de l’infection en quelque sorte, explique le Dr. Manuel Rosa-Calatrava. A partir de là, l’objectif était de trouver des molécules capables d’inverser cette signature afin de rendre la cellule hermétique aux virus", clarifie-t-il.

Cinq molécules d’activité anti-grippale prometteuse

C’est ce que son équipe a réalisé dans un second temps. Les chercheurs ont ainsi identifié des molécules ayant déjà une autorisation de mise sur le marché et présentant une activité antivirale in vitro contre l'ensemble des virus influenza (H1N1, H3N2, H5N2, H7N7 et H5N1). "Cinq molécules présentent une activité anti-grippale à large spectre contre ces différents virus de la grippe y compris le virus pandémique A(H1N1) de 2009. A ce titre, elles ont fait l’objet d’un dépôt de brevet pour cette nouvelle indication anti-infectieuse", précise le le Dr. Manuel Rosa-Calatrava.

Feu vert pour l’étude FluMeD

La plus prometteuse d’entre elles in vitro, le chlorhydrate de midodrine, fait l’objet d’un premier essai clinique (FluMeD) dans le cadre d’un Programme Hospitaliers de Recherche Clinique avec les Hospices Civils de Lyon et son Centre d’investigation Clinique. L’objectif est de valider son efficacité antivirale en termes de vitesse d’élimination du virus. Pour cela, 161 patients âgés de 18 à 64 ans, consultant pour une grippe évoluant depuis moins de 42h et n’ayant pas reçu de vaccination antigrippale, seront recrutés par des médecins généralistes dans la zone du Grand Lyon, pendant les deux saisons grippales 2011-2012 et 2012-2013. La moitié d’entre eux recevra du midodrine pendant 5 jours et l’autre moitié, un placebo. Les investigateurs effectueront un prélèvement nasal 0, 2, 3, 5 et 7 jours après le début du traitement pour mesurer la concentration de virus et évaluer la fréquence de réponse clinique au médicament (disparition complète ou atténuation des principaux symptômes). Les résultats sont attendus en septembre 2013.

Source: inserm